Par Francis CAROLE
La colère des Kanaks qui s’est exprimée ces derniers jours serait, si l’on en croit le pouvoir colonial français et ses thuriféraires des médias, le fait de la Chine, de la Russie, de l’Azerbaïdjan et-pourquoi pas, tant qu’on y est-des martiens.
La main de l’étranger et « l’ingérence » constituent toujours une parade facile pour masquer sa propre médiocrité, justifier les décisions arbitraires et tenter de jeter le discrédit sur celles et ceux qui osent contester l’ordre colonial.
Le fait est que le peuple Kanak n’a attendu personne pour, à partir de 1853, année de prise de possession de son territoire par les Français, se soulever à de multiples reprises, sans subordination politique à quiconque, ni à des puissances étrangères ni à d’improbables philanthropes descendus du ciel.
C’est la brutalité, la violence, la perfidie du système colonial français lui-même et la conscience de ses propres valeurs par le colonisé qui guident l’esprit de révolte. Partout où le colonialisme français est passé, il n’a suscité, durablement, que haine et colère. Et il a fini par être chassé sans rémission d’Asie, du Maghreb, d’Afrique et d’ailleurs.
Aujourd’hui, l’attitude suffisante et irresponsable de l’État macronien -une petite bande d’homo stupidus stupidus stupidus(l’homme trois fois abruti)-génère la même colère et la même urgence de se débarrasser de la clique coloniale.
Comment ont-ils pu s’imaginer que les Kanaks, après les concessions majeures faites par le FLNKS lors de l’Accord de Nouméa, accepteraient, de surcroît, de se voir imposer une loi qui, si elle était appliquée, achèverait de les rendre étrangers dans leur propre pays au profit des colons français, les mêmes qui, comme jadis, se retrouvent aujourd’hui dans les milices qui assassinent les jeunes Kanaks ?
Ce constat fait, il est de la responsabilité d’un mouvement de libération de chercher les soutiens internationaux dont il a besoin, tant qu’il reste le maitre absolu de sa propre lutte.
L’une des constantes de l’Etat colonial consiste immanquablement à priver le peuple colonisé de toute représentation et représentativité dans la sphère internationale. Le peuple colonisé est considéré dans l’imaginaire du colon comme un peuple mineur. Il n’a pas droit à la parole dans le concert des nations. C’est le colonisateur qui parle à sa place. Il est mis en état d’isolement et de non-existence politique par rapport aux autres peuples. Il est hors-monde, condamné à s’abîmer éternellement dans un tête-à-tête pathologique avec le colonisateur.
Or, personne ne peut ni ne doit parler à notre place. De même, la France est libre de recevoir somptueusement le président de la Chine, d’acheter massivement du pétrole brut en Azerbaïdjan ou d’entretenir des relations soutenues avec le Qatar dont on sait qu’il finance le « terrorisme international ». Nous ne lui contestons pas ce droit.
L’un des défis des mouvements de libération nationale se veut justement de sortir de cette mise en cage et de porter dans le débat mondial les aspirations de leurs peuples et leur voix singulière qui ne peut être, pour ce qui nous concerne, la voix de l’empire colonial français.
La France a institué une ingérence structurelle, anachronique, exclusive, permanente et étouffante dans les affaires des nations et des peuples colonisés. Cela doit cesser.
De l’air !
Francis CAROLE
MARTINIQUE
Dimanche 19 Mai 2024