Par Francis CAROLE
Le 2 mai 1945, l’Armée Rouge écrasait les troupes du Troisième Reich nazi, à Berlin. Le 8 Mai 1945, à 23h01, le haut commandement allemand signait sa capitulation, en présence des représentants de l’URSS, des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni. Ainsi était mis fin à la guerre anti-fasciste et anti-nazie de 1939-1945 et aux prétentions de certains d’instaurer un ordre mondial fondé, ouvertement, sur la prétendue supériorité d’une race et sur son soi-disant « droit » à dominer l’humanité.
C’est pourtant dans la période de cette commémoration-là, le 6 mai 2023, que le gouvernement français a autorisé les héritiers de Mussolini et de Hitler à défiler, masqués, dans les rues de Paris, poliment encadrés par les forces de police. Le « pays des droits de l’homme » -ou autoproclamé tel- s’accommodait du plus vil et crachait sur la mémoire des dizaines de millions de victimes du nazisme et sur celle des femmes et des hommes qui ont sacrifié leur vie pour empêcher la victoire de la bête.
Comment concilier l’hommage rendu à Jean Moulin, unificateur de la Résistance française et cette bienveillance à l’égard des néo-nazis du « Comité du 9 Mai » ?
Schizophrénie ? Oubli ? Perte de sens aussi absolu qu’impardonnable d’une période d’abîme ? Ou acceptation vicieuse d’idées qui, loin d’être mortes, reviennent subrepticement, par sacs et ressacs, s’installent dans les consciences mortes et préparent une nouvelle plongée dans l’abîme ?
Disons les choses clairement ! Il s’agit d’une complicité idéologique qui ne veut pas dire son nom. Nul n’obligeait en effet la préfecture de police de Paris à accepter cette demande d’autorisation de manifester ! Le discours de dénonciation permanente de Darmanin contre ce qu’il appelle l’ultra-gauche en dit long sur sa mansuétude à l’égard de l’extrême-droite.
On sait que le funeste « Groupe Union Défense » (GUD), les « Jeunesses nationalistes Révolutionnaires » et les jeunesses du Front National ont contribué à la création de ce « Comité du 9 Mai ». Le GUD reste dans la tradition de violence, de radicalisme raciste et néo-nazi du groupe « Occident » (fondé en 1964 et dissout en 1968) qui, jadis, a compté dans ses rangs de futurs ministres de droite comme Patrick Devedjian, Gérard Longuet ou encore Alain Madelin. La frontière est d’ailleurs souvent poreuse entre l’extrême-droite et une partie de la droite dite classique…voire au-delà…
À la fin des années 60 et les décennies suivantes,les étudiant.e.s des Antilles et d’Afrique ont eu à affronter ces groupes qui sévissaient dans certaines universités.
L’idéologie nazie et fasciste n’est pas morte. Dans des contextes de crises et de paupérisation des couches populaires et moyennes des nations européennes, elle peut retrouver des espaces favorables à son développement. C’est pourquoi il faut maintenir la garde haute et sortir de l’illusion que le diable peut être « dédiabolisé »…
Le terreau encore fertile de l’extrême-droite demeure le suprémacisme caucasien qui, après la seconde guerre mondiale et malgré les crimes du nazisme, a continué à prospérer à travers le régime de l’apartheid, le colonialisme et, aujourd’hui, le néocolonialisme. Tant que l’Occident ne sera pas au clair avec cette matrice idéologique de son histoire-ou tant que nous ne l’aurons pas contraint à l’être-le danger persistera.
Francis CAROLE
MARTINIQUE
Mardi 9 Mai 2023