Par Francis CAROLE
La presse locale a récemment fait état de l’explosion, entre janvier 2022 et janvier 2023, des tarifs du transport aérien de passagers dans les derniers confettis de l’empire français. Plus de 47% de hausse !
Au-delà de la question récurrente de la “continuité territoriale” se posent ici, et peut-être plus fondamentalement, celles de la formation des prix des billets d’avion et de notre dépendance par rapport à la France.
Cette moyenne de 47% recouvre, à y regarder de plus près, des situations assez différentes. Ainsi, la Martinique et la Guadeloupe affichent les augmentations les plus brutales ( +51,2% pour Fort-de-France et +49,% pour Pointe-à-Pitre). À l’inverse, pour la même période, la hausse se limite à 2,9% pour Mayotte, en raison, nous indique-t-on, “de l’arrivée d’un nouveau concurrent pour la desserte de la Métropole” ( chiffres du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et du ministère de la transition énergétique, en date du 22 février 2023).
Les compagnies aériennes qui desservent nos pays (Air-France, Corsair, Air-Caraibes) s’empressent, pour justifier ces augmentations, d’incriminer la guerre en Ukraine, l’ inflation et le prix des carburants. On se souvient d’ailleurs du tapage médiatique organisé par la Fédération Nationale de l’Aviation et de ses Métiers à propos de l’augmentation de 15% du kérosène par la SARA sur les aéroports de Martinique et Guadeloupe.
Certes, ces explications sont, en partie, à prendre en considération; en effet, on admet généralement que le kérosène participe à hauteur de 30 à 45% à la formation des prix des billets. Ces arguments ne suffisent cependant pas à justifier le scandale de ces augmentations abusives dans nos pays, d’autant que cette tendance risque de s’accentuer dans les prochains mois.
On note par exemple que sur le réseau intérieur français l’augmentation des prix n’est que de 13,4%. Au départ du territoire français, toutes destinations considérées, elle est de 22,5%, à l’exception de quelques rares destinations. L’inflation seule n’explique donc pas la hausse de 51% pour le cas de la Martinique.
En réalité, la fin des deux ans d’épidémie de Covid -qui avaient considérablement affecté les transports aériens- a entraîné une explosion de la demande et des prix, au-delà du seul prétexte de l’inflation et du prix des carburants. Les demandes augmentant plus vite que l’offre, les prix se sont ainsi envolés. Par ailleurs, l’objectif des compagnies aériennes a consisté à chercher à combler les pertes de 2020-2021 et à se refaire une santé financière sur le dos de leurs passagers. Elles se sont donc concentrées sur les destinations les plus porteuses et ont tiré vers le haut les tarifs.
La Martinique, comme la Guadeloupe, sont des destinations captives qui se prêtent bien à cette stratégie de spéculation -voire de pwofitasyon- des compagnies qui, en l’absence d’une véritable concurrence, se sont entendues pour engranger le maximum de profit possible.
En effet, la situation d’extrême dépendance à l’égard de la France et la densité des relations aériennes obligatoires que celle-ci crée (travail, formation, santé, transports funéraires, raisons familiales, etc…) ne laissent aucun autre choix à nos compatriotes que de payer les prix scandaleux imposés.
Francis CAROLE
MARTINIQUE
Lundi 20 mars 2023